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De la mise en culture à l'élimination : comment optimiser les bioraffineries

Un nouveau concept de bioraffinerie développé par la Haute école spécialisée bernoise BFH démontre qu’il serait possible de produire du carburant pour avions à partir de matière végétale neutre sur le plan climatique. Certains problèmes restent en suspens, mais peuvent être résolus dans la pratique moyennant des projets pilotes.

Résumé du projet de recherche « Durabilité des biocarburants ». Ce projet s'inscrit dans le cadre du projet conjoint « Biocarburants produits par conversion biochimique et catalytique ».
Les bioraffineries sont en mesure de produire du carburant renouvelable pour avions à partir du maïs. Un projet de recherche a permis de concevoir une optimisation de ce processus.
Les bioraffineries sont en mesure de produire du carburant renouvelable pour avions à partir du maïs. Un projet de recherche a permis de concevoir une optimisation de ce processus. Pixabay/fietzfotos
En un coup d’œil

En un coup d’œil

  • Le carburant produit à partir de biomasse et non de vecteurs d’énergie fossiles non renouvelables est une opportunité, mais également source de risques.
  • La disponibilité de biomasse issue de l'agriculture et de la sylviculture suisses est plus élevée que supposée.
  • L'exploitation de nouvelles bioraffineries nécessite une optimisation énergétique des installations.

Du maïs à perte de vue : il y a une dizaine d'années, un boom du biogaz en Allemagne a conduit à de vastes étendues couvertes pratiquement que de maïs. En effet, la loi sur les énergies renouvelables (Erneuerbare-Energien-Gesetz, EEG) a favorisé les installations biogaz. Celles-ci sont souvent alimentées avec du maïs. L'objectif était de convertir en électricité la biomasse poussant sur les champs, et de réduire ainsi la dépendance vis-à-vis des sources de carbone fossiles comme le lignite.

Cependant, les champs de maïs et de colza plantés pour la production de biodiesel ont engendré des répercussions écologiques indésirables : ils sont devenus un paradis pour les rats et les sangliers. Les populations de ces derniers ont littéralement explosé, ce qui, selon la Wirtschaftswoche 2011, a conduit à des dommages de 1000 à 2000 euros par hectare. En outre, la culture du maïs pour la production de biogaz est en concurrence avec la production de fourrage et fait augmenter les prix de fermage.

Optimisation grâce à des méthodes d'évaluation

Un projet de recherche de la Haute école des sciences agronomiques, forestières et alimentaires HAFL de la Haute école spécialisée bernoise BFH avait pour but de développer une nouvelle méthode pour mieux évaluer au préalable les risques pour l’être humain, l'environnement et les populations végétales, susceptibles de survenir lors de la production, de l'utilisation et de l'élimination des carburants et des plastiques à base de biomasse.

Outre une évaluation des risques, ce projet de recherche propose des moyens de réorganiser les chaînes de processus et de les rendre plus efficaces. Ainsi, les résultats de ces travaux servent de base importante pour les décisions politiques et les entreprises concernant l'utilisation de l'énergie verte.

Le projet décrit ici était spécifiquement axé sur la conversion de la biomasse dite lignocellulosique en carburant pour avions ou en produits chimiques de base. La lignocellulose est présente dans la paroi cellulaire du bois et de la paille des végétaux. Ce type de biomasse est la matière première la plus couramment utilisée pour la production de biocarburants, dont le bioéthanol.

500 000 tonnes de matière sèche sont disponibles

Pour d'une part identifier les risques en rapport avec la durabilité et d’autre part les contourner, les chercheurs travaillant sur ce projet ont effectué une évaluation technique, économique et écologique des processus liés à la bioraffinerie, allant de la culture des plantes à leur élimination. Ils ont, dans un premier temps, déterminé la quantité de biomasse actuellement disponible. Dans l'agriculture et la sylviculture suisses, environ 500 000 tonnes de matière sèche seraient durablement disponibles chaque année pour le bioraffinage. Elles sont constituées de bois résiduel, de résidus de récolte (principalement de paille de céréales, de maïs et de colza) et de biomasse herbacée provenant de prairies non fertilisées et à densité peu élevée de bétail. Bon nombre de ces prairies sont des zones de compensation écologique ne pouvant être fertilisées mais devant être fauchées. Cette herbe n'a qu'une faible valeur alimentaire pour les animaux de rente.

Dans un deuxième temps, les chercheurs ont déterminé comment récolter et traiter cette biomasse sans endommager les prairies et les forêts, en adoptant par exemple dans les champs des contre-mesures durables telles que l'utilisation de fumier ou le semis direct. Ce dernier consiste à semer sans labourer, afin de ralentir la décomposition de l'humus, processus nuisible au climat et aux sols. Les chercheurs considèrent qu’en tenant compte de ces facteurs, les atteintes à la nature sont peu probables.

La rentabilité dépend d’un prix plus élevé du kérosène

Sur le plan économique, ils sont d’avis que la vente aux bioraffineries de biomasse produite et traitée de manière durable représente une nouvelle opportunité pour l'agriculture suisse ; à condition que les bioraffineries soient en mesure de vendre leur kérosène à environ deux fois le prix du kérosène fossile disponible aujourd'hui. Les bioraffineries sont également à même de contribuer à la décentralisation, aspect recherché non seulement au niveau de la transition énergétique, mais aussi dans la politique agricole et économique suisse. A moyen terme, l’émergence d’un nouveau marché pour la biomasse agricole et les ressources en bois provenant de régions excentrées comme le Jura est imaginable.

Le kérosène produit de manière durable est susceptible d’accroître l'acceptation de la transition énergétique

Le projet révèle que l'impact sur le marché global de l'énergie serait cependant faible, le carburant pour avions étant un marché de niche. Et même au sein de ce marché de niche, les conditions politiques en vigueur détermineraient le succès du biocarburant. Il dépendrait par exemple de l’exonération ou non de taxes sur ce carburant, sur la base de critères de durabilité.

C’est une des raisons pour lesquelles des questions économiques et techniques restent en suspens. Seules des applications pilotes dans la pratique pourront y répondre. Les chercheurs sont néanmoins d’avis que la production durable de carburant à partir de biomasse suisse serait bien accueillie par une part importante de la population, augmentant ainsi l'acceptation de la transition énergétique.

Le projet conjoint, comprenant également deux autres sous-projets, porte sur le développement de nouveaux procédés de transformation de la biomasse végétale (sous-produits tels que la paille de maïs, les résidus végétaux fraîchement coupés et le bois de hêtre) en carburants spéciaux pour avions et trains de marchandises et en précurseurs pour la production de matières plastiques.

Contact et équipe

Prof. Dr. Jan Grenz

Berner Fachhochschule
Hochschule für Agrar-, Forst- und Lebensmittelwissenschaften
Abteilung Masterstudien
Länggasse 85
3052 Zollikofen

+41 31 910 21 99
jan.grenz@bfh.ch

Jan Grenz

Direction du projet

Fabienne Bauer

Ayse Dilan Celebi

Stefanie Hellweg

Raphael Mainiero

François Maréchal

Stephan Pfister

Bernhard Streit

Le contenu de ce site représente l’état des connaissances au 17.12.2018.